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Message du Général De Gaulle
au Conseil National de la Résistance
à l'occasion de sa 1ère réunion

Dans cette guerre où la patrie joue son destin, la formation du Conseil national de la Résistance, organe essentiel de la France qui combat, est un événement capital.

L’unité des buts et des sentiments établie depuis longtemps entre la masse de la nation qui lutte sur son territoire et ceux de ses fils qui combattent en dehors se traduit désormais par l’unité dans l’action.

Car c’est de cela, d’abord, qu’il s’agit. Pour que la Libération et la Victoire soient françaises, il est impérativement nécessaire que la Nation se rassemble dans un effort proprement français. Notre intérêt immédiat, notre grandeur de demain, peut-être même notre indépendance, sont à ce prix. Tout ce qui est dispersion, action isolée, alliance particulière, dans n’importe quel domaine où se déroule la lutte totale, compromet à la fois la puissance des coups portés à l’ennemi par la France et sa cohésion nationale.

C’est pourquoi il est essentiel que la résistance sur le territoire national forme un tout cohérent, organisé, concentré. C’est fait, grâce à la création du Conseil national de la Résistance qui fait partie intégrante de la France combattante et qui, par là même, incarne la totalité des forces de toute nature engagées à l’intérieur contre l’ennemi et ses collaborateurs.

Mais l’affreux bouleversement politique, économique, social, moral, où le désastre, la trahison, l’usurpation ont plongé notre pays, ne prendra pas fin par le seul fait que les forces allemandes et italiennes auront été écrasées par les forces alliées. Ce bouleversement a des causes profondes. Il aura d’immenses conséquences. La guerre présente est pour toutes nations, mais avant tout pour la France, une colossale révolution.

Il est donc en premier lieu et immédiatement nécessaire que la Nation fasse en sorte d’émerger de la Libération dans l’ordre et dans l’indépendance, ce qui implique qu’elle soit organisée par avance de manière à être aussitôt gouvernée, administrée, suivant ce qu’elle-même désire, en attendant qu’elle puisse s’exprimer normalement par le suffrage des citoyens.

À ce point de vue, le Conseil national de la Résistance doit, d’ores et déjà, apporter au Comité national français des éléments pour ses décisions quant aux dispositions à prévoir à mesure de la Libération. D’autre part, au moment de la Libération elle-même, le Conseil doit apparaître comme une sorte de première représentation des désirs et des sentiments de tous ceux qui, à l’intérieur, auront participé à la lutte. Ainsi pourra-t-il fournir au Comité national lui-même l’appui, le concours et, dans une large mesure, valoir sans délai, vis-à-vis des puissances étrangères, les droits et les intérêts de la France.

Il s’agit, enfin, de savoir si nous saurons sortir du chaos par une rénovation susceptible de rendre à la Patrie sa grandeur avec les moyens de jouer le rôle éminent qui revient à son génie et, en même temps, d’assurer à tous ses enfants la sécurité, la liberté, la dignité, dans leur travail et dans leur vie. Il appartient au Conseil national de la Résistance, plongé au centre du creuset où, dans sa douleur et dans son combat, se forge la France nouvelle, de recueillir toutes les données et de susciter tous les travaux qui pourront éclairer la Nation et guider ses dirigeants dans le choix de la route qui la mènera vers son avenir.

Telle est la tâche très étendue et très périlleuse qui incombe au Conseil national de la Résistance. L’importance en est extrême. Le Conseil s’en acquittera, malgré toutes les difficultés, avec le seul but de servir la France et en s’inspirant constamment de cette fraternité nationale qui, seule, permet à la Nation de résister à ses malheurs et la mettra, demain, à même de se reconstruire et de se renouveler.

Londres, le 10 mai 1943


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