Le site lesamitiesdelaresistance.fr est en vente. Coordonnées par mail : [email protected]
LA LUTTE ARMÉE : LES GRANDS MAQUIS
Le Mont Mouchet (Auvergne)

UN ÉPISODE TROP MÉCONNU,
MAIS TRÈS HÉROÏQUE DE LA RÉSISTANCE FRANÇAISE

"Dans la guerre, comme dans la paix, le dernier mot est à ceux qui ne se rendent jamais."
Georges Clémenceau
Épigraphe du journal clandestin Combat 1941

Ce haut lieu de la résistance en Auvergne a été le théâtre de terribles et sanglants combats au cours du mois de juin 1944, au cœur du massif de la Margeride, là ou les départements de la Haute-Loire, du Cantal et de la Lozère se rencontrent.

Le Mont-Mouchet a été le point de départ de la "levée en masse" des volontaires auvergnats contre l’occupant nazi.

L’imminence d’un débarquement en France et les instructions reçues de Londres, dans la deuxième quinzaine d’avril 1944, par les responsables régionaux incite le Comité régional de la Libération de la région 6 (Auvergne) présidé par Henry Ingrand, commissaire de la République, à donner le 2 mai 1944 à ses "sédentaires" l’ordre de rejoindre les trois maquis réduits du Mont-Mouchet, de la Truyère et du Lioran.

Un premier ordre est lancé le 8 mai. Le colonel Émile Coulaudon (Gaspard), chef régional de l’Armée secrète, demande aux responsables départementaux et cantonaux que les effectifs des "sédentaires" recensés et agréés reçoivent l’ordre de rejoindre immédiatement le maquis réduit, qui leur sera fixé et que tous ceux qui sont en état de porter les armes gagnent les réduits "d’où partira le mouvement de libération générale de notre territoire".

Cet "appel aux armes" est diffusé le 20 mai dans les 4 départements auvergnats. Dans les jours qui suivent des milliers de patriotes gagnent les trois maquis réduits.

Ce fut la montée en masse des "sédentaires" des villes et des villages d’Auvergne. Toutes les routes étaient encombrées.

Dans certains villages, les chefs civils de la Résistance affichaient "l’appel aux armes" et les hommes partaient en chantant pour rejoindre les lieux désignés.

Le 6 juin 1944, jour du débarquement en Normandie les effectifs armés des trois maquis réduits s’élevaient au :

Alerté par ces importants rassemblements et disposant de renseignements précis et du SD, de l’Abwehr et de la milice du Cantal, le général de division Von Brodowski, commandant l’état-major principal de liaison 588 de Clermont Ferrand, demande au général commandant le territoire France Sud à Lyon "l’envoi de troupes pour anéantir les préparatifs de mobilisation particulièrement importants dans la région Est de Saint-Flour, en forêt de la Margeride et dans le massif du Mont Mouchet".

2 juin 1944

Une colonne de l’Ost Legion venant de Rodez-Mende, attaque le réduit du Mont-Mouchet par le Sud, dans l’intention d’en déterminer l’importance et les limites. Après une journée de combat et s’étant heurté à une très forte contre attaque d’éléments du Mont-Mouchet, ce premier assaut est repoussé.

3 juin

Ayant appris cet échec et après l’ordre donné par le général commandant France Sud à Lyon au général Von Brodowski de "rétablir au plus tôt l’autorité des troupes d’occupation dans le département du Cantal", celui-ci envisage de déclencher l'opération aux environs du 6 juin.

6 juin

Les préparatifs sont lents mais conséquents. L’état-major principal de liaison 588 de Clermont-Ferrand est surpris que les FFI d’Auvergne n’entrent pas en action le jour du débarquement.

8 juin

Réunion à cet état-major pour mise au point définitive de l’opération.

9 juin

"Toute circulation automobile est interdite dans les quatre départements : Allier, Puy de Dôme, Haute-Loire, Cantal. Le feu sera ouvert sur tout véhicule circulant".
La mise en place des unités de la Wehrmacht pour l’assaut du Mont Mouchet est terminée avec le PC du général Jesser à Saint-Flour.

10-11 juin

L’attaque est menée par trois groupements tactiques 2200 à 3000 hommes convergeant vers le PC du réduit (maison forestière du Mont Mouchet) :

Le 10 juin, les premiers combats éclatent en début d’après-midi à la Vachellerie et aux Salles, sur la commune de Saugues. D’autres sont engagés à Pinols au carrefour des "quatre routes" et dans le Cantal à Ruynes, Clavières.

À l’Est , les allemands sont repoussés à Saugues par les éléments du Réduit de Venteuges.

Au Sud la section qui protège Clavières est obligée d’évacuer le village. Les allemands attaquent à nouveau les unités qui protègent son accès.

Face à cette résistance opiniâtre, l’état-major du général Jesser décide le retrait à la tombée de la nuit de ses unités ; le groupement Enss regagne Saint-Flour.

Le 11 juin dans la matinée, les troupes allemandes reprennent leur progression vers le Mont Mouchet, l’étau ne cesse de se resserrer, le manque de munitions commence à se faire sentir. Aussi la décision de repli général est prise pour le 11 au soir.

Au Sud Ouest, deux compagnies du Réduit de la Truyère tentent en vain de ralentir l’avancée allemande, toutefois, leur action héroïque permet aux unités ayant déjà combattu la veille de se replier en direction du Réduit de la Truyère.

À Venteuges, la situation est tout aussi difficile. Les unités de la Wehrmacht échouent dans une tentative de contournement. Aussi la grande majorité des combattants parviennent à se replier vers les forêts de Mercoire en Lozère.

Le PC (Maison Forestière) du Mont Mouchet n’est atteint par l’ennemi que dans la matinée du 12 juin.

Du 13 au 18 juin

La Wehrmacht patrouille dans toute la zone qu’elle vient d’investir, capturant encore ça et là quelques maquisards qui tentent de briser l’encerclement, et qu’ils fusillent ou achèvent.

Des reconnaissances aériennes et de nouveaux renseignements des services spécialisés allemands signalent à l’état-major principal de liaison 588 de Clermont-Ferrand, la présence d’une forte concentration de "terroristes" dans la région de Chaudes Aigues (22 km SO de Saint-Flour).

Aussi, l’état-major principal de liaison 588 charge le général Jesser d’une action énergique contre ce centre de "bandes". Cette opération sera déclenchée après les résultats d’une nouvelle reconnaissance aérienne en cours.

20 juin

L’attaque est menée par trois groupements tactiques de la Wehrmacht (3000 hommes) convergeant ver le PC du Réduit de la Truyère, implanté à Saint-Martial :

À midi, un message opérationnel du groupement Abel signale que "l’intervention contre les bandes à Chaudes Aigues prend un cours favorable, Chaudes Aigues entre nos mains, rencontrons une résistance acharnée".

Toute la journée de violents combats vont se dérouler à quelques kilomètres du PC. À la nuit tombante, après des combats acharnés, le colonel Gaspard donne l’ordre de repli, la grande majorité des éléments du réduit peut échapper à la destruction ou à la capture.

30 juin

Tirant les conséquences de l’impossibilité où ils avaient été de conserver l’inviolabilité de leurs deux réduits, faute d’armements lourds et d’apport extérieur qui leur avaient été pourtant promis, les chefs militaires des maquis d’Auvergne décidèrent alors de répartir toutes leurs unités sur l’ensemble des quatre départements de la région 6 en 20 zones de guérilla.

Il appartient de préciser que depuis le 8 mai 1944, une mission Jedburgh "Benjoin", composée d’un major britannique Freddy Cardozo (Vecteur), d’un capitaine des FFL Bernard Goury (Médiane, Chonan), d’un capitaine américain Jacques Lebaigue (Spirale) et d’un radio Jean Trollet (Somali), fut parachuté aux environs du Mont Mouchet sur le terrain "Plongeon".

De son côté, le réduit de la Truyère disposait de la mission "Freelance" du SOE, tous des britanniques, le capitaine John Farmer (Hubert, Jean), Nancy Wakel (Hélène, Andrée), courrier, et de Joseph Rake (Justin, Denis), radio.

Geneviève Letonturier (Ginette, Claire) assumait le secrétariat auprès de Georges Louis Rebattet (Cheval), chef du Service national maquis, puis à l’état-major des maquis d’Auvergne. À la Libération, elle sera auprès de Henry Ingrand, commissaire de la République à la préfecture de Clermont-Ferrand.

Le Service de Santé de l’état-major des maquis d’Auvergne, proche de la maison forestière au Mont Mouchet, en relation avec les diverses antennes médicales des compagnies, se trouvera en charge de 65 blessés graves. Participant à tous les combats, il subira un odieux carnage à Estremiac où une partie des blessés et leur encadrement sanitaire seront exterminés lâchement par un élément de la Wehrmacht.

Georges Canguilhem, Jean Simon et un blessé fraîchement amputé s’en tireront miraculeusement. Mme Marie Menut (Marinette) sera capturée, torturée et mise à mort. Son père Fernand Lafaye et le professeur Reiss sont exécutés sur place.

Le commandant Max Menut (Bénévol) était le chef de ce service où se retrouvaient encore Laurette Meyer (France), Roger Guignard, Marcel Chomard, Charles Bérénholc (Charles), Pierre Nugou, rejoint parfois par le docteur Louis Mallet, et Henry Ingrand (Dr Rouvres).

Ces combats meurtriers peuvent se traduire aussi avec ces chiffres :

Pertes FFI et civils
Mont-Mouchet 125 FFI 60 civils
Réduit de la Truyère 135 FFI 10 civils
Total 260 FFI 70 civils

Pertes ennemies Mont-Mouchet : une centaine avec les unités de l’Ost Legion.
Réduit de la Truyère : inconnues

Depuis le 20 mai 1945, plusieurs milliers de personnes viennent de toutes les régions de France, souvent aussi de l’étranger, chaque année, courant juin, se recueillir et revivre par la pensée les heures d’angoisse, de lutte, d’espoir, de sacrifices qu’ils vécurent au Mont Mouchet, commune d’Auvergne en Haute-Loire.

Dans le cadre superbe d’une vaste clairière de plus de trois hectares, située au cœur de la forêt domaniale du massif du Mont Mouchet (1465 m) se dresse l’imposant monument national dédié "À la Résistance française et aux maquis de France".

Un peu plus bas, sur le dernier pan de mur, reste de la maison forestière qui fut le PC de l’état-major régional des Maquis d’Auvergne en mai-juin 1944, est scellé un médaillon de bronze avec le portrait du colonel Émile Contaudon (Gaspard), Compagnon de la Libération, chef des FFI d’Auvergne.

Depuis la Libération, cette émouvante commémoration a toujours été présidée par les Présidents de la République, par les ministres de la Défense ou des Anciens Combattants et Victimes de guerre, par des responsables nationaux de la Résistance (Bourgès-Maunoury, Jean-Pierre Lévy, Daniel Mayer, le général Dejussieu-Poncarel, etc. ou par d’authentiques résistants auvergnats.

Une émouvante cérémonie du 60e anniversaire a eu lieu le dimanche 20 juin 2004 au Mont Mouchet.

Mme Michèle Alliot Marie, ministre de la Défense, représentait monsieur Jacques Chirac, Président de la République, à celle-ci.

Après avoir salué le drapeau du 92e RI et passé les troupes en revue, Mme la ministre est accueillie par le général de division (cr) Gilles Lévy, président d’honneur du Comité d’union de la Résistance d’Auvergne (CODURA) devant la stèle du colonel Gaspard, chef des FFI d’Auvergne.

Sous les applaudissements d’une assistance de plus de 2000 personnes, elle a lu le message (texte ci-dessous) du Président de la République

Le ravivage de la flamme du monument national et le dépôt de très nombreuses gerbes de fleurs au pied de ce dernier suivra. Des fleurs des champs sont aussi déposées par les enfants de la commune d’Augers.

Après avoir salué et remercié les 55 portes drapeaux présents, après un bain de foule, Mme Alliot-Marie a visité l’important musée du mont Mouchet avant de s’envoler pour Paris.


Retour en haut de page